La cave du Dr Orlof

Notes en vrac

mercredi, février 13, 2008

Y comme Yourcenar (ter)

Conte bleu suivi de Le premier soir et de Maléfice (1927-1930) de Marguerite Yourcenar (Gallimard. Folio. 2001)

Troisième tentative pour se plonger dans l’univers littéraire de Marguerite Yourcenar et troisième échec : ces abécédaires m’auront permis de découvrir que je n’aime décidément pas cet écrivain (je préfère néanmoins les inégales Nouvelles orientales à l’assommant Feux)

Je serai très bref tant ces trois nouvelles m’ont paru sans le moindre intérêt.

Conte bleu est, d’après la dévote Josyane Savigneau, le plus « littéraire » de ces contes. Eh bien c’est celui qui m’a le plus accablé ! J’y ai retrouvé tout ce que je déteste chez Yourcenar : un style ampoulé, un langage affecté et une volonté tellement visible à chaque ligne de donner un coup de coude dans les côtes du lecteurs en lui soufflant « admire comme c’est littéraire » qu’elle en devient insupportable.

Maléfice souffre également de cette pose maniérée qui empêche d’adhérer à cette histoire de jeune femme malade qu’on croit possédée. C’est néanmoins plus lisible.

Le premier soir est sans doute le moins pénible des trois récits. Yourcenar décrit les impressions d’un couple tout juste parti en voyage de noces et qui réalise que le mariage n’est peut-être pas la panacée. L’homme se prend à voir celle qu’il côtoie comme une future épouse dévouée et ménagère et finit par regretter une maîtresse qu’il a abandonnée. Cette nouvelle montre subtilement le cheminement d’un doute dans l’esprit de l’homme puis d’un désenchantement qui annonce, d’une certaine manière, l’existentialisme. On songe à la nausée de Sartre et à ce sentiment d’absurde qui gagne des personnages ayant sacrifié à une tradition (le mariage) dont ils n’éprouvent plus le sens.

D’aucuns verront aussi dans ce conte les premiers prémisses d’une revendication féministe où apparaît l’idée qu’une femme peut-être autre chose qu’une épouse et une mère de famille. Sauf que -ironie du sort !- la préfacière nous apprend que ce conte n’a pas été écrit par la romancière même s’il a paru sous son nom. Il s’agit, en effet, d’un court récit écrit par le père de Yourcenar qui lui proposa ce stratagème pour éviter d’avoir à démarcher les éditeurs à son âge, l’écrivain se contentant de lui trouver un titre et d’apporter quelques corrections.

Le premier soir nous apprend que dans la famille Yourcenar (Crayencour devrions-nous écrire), le véritable écrivain, c’était peut-être le père…

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4 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Avec Yourcenar c'est comme ça, elle a toujours ce ton posé (pour ceux qui aiment) ou ampoulé/pontifiant (pour ceux qui ne supportent pas).
Personnellement je fais partie de ceux qui aiment ; je n'ai pas lu Feux ni Conte bleu and cie, mais j'aime beaucoup les Nouvelles Orientales.
Cela dit ce n'est pas forcément dans les récits courts que Yourcenar montre ce qui est vraiment attachant dans ses écrits ; ce qui me paraît le plus sympathique dans ce qu'elle a fait c'est une certaine façon de s'effacer dans ses romans face à ses personnages. Dans l'Oeuvre au Noir par exemple elle créée environ une soixantaine de personnages, et aucun n'est simplement un instrument (si, il y en a un qui sert uniquement à dynamiter un mythe qui l'énerve, mais c'est une exception). Elle a un certain art de l'ellipse qui permet à chacun de prendre une vie propre, des qualités et des défauts qui rendent très difficile de les juger, ou de prévoir la façon dont ils évoluent (car ils ont tous le droit d'évoluer!).
Et surtout, elle a fait preuve par la suite d'un art certain pour mêler complètement réel et imaginaire, passé, présent et futur.

11:34 PM  
Anonymous Anonyme said...

Tu as lu "Anna, Sorror..."? Il me tente bien...Et puis j'ai toujours "l'oeuvre au noir" à lire.

10:38 PM  
Blogger Dr Orlof said...

Non, je n'ai pas lu les livres dont vous parlez! Je pensais arrêter avec Yourcenar mais, finalement, je tenterai peut-être un jour "les mémoires d'Hadrien" et "l'œuvre au noir"...

1:09 PM  
Anonymous Anonyme said...

Attention pour les Mémoires d'Hadrien, il y a un contresens qui peut être néfaste, et qui serait d'imaginer que l'auteur prend le masque d'Hadrien pour nous déverser de sages considérations sur la vie (auquel cas ce serait assez insupportable).
En fait il s'agit véritablement d'une expérience de sympathie, elle a eu l'idée de ce livre à 20 ans environ, et elle a mis 20 ans avant de reprendre le projet parce qu'elle ne trouvais pas vraiment la voix de l'empereur, comment il aurait parlé et ce qu'il aurait dit... Il y a un boulot de doc considérable qui n'est pas inutile (du genre savoir si les romains se mouchaient de la main droite ou la main gauche), mais qui sert vraiment à essayer de voir le monde comme il a pu le voir, et de dire ce qu'il aurait pu dire. Une volonté réelle de laisser parler quelqu'un qui n'est plus, et qui n'est pas elle.

5:27 PM  

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