La cave du Dr Orlof

Notes en vrac

mardi, août 05, 2008

Bibliothèque idéale n°37 : les grandes figures de l'histoire

Fouquet ou le soleil offusqué (1961) de Paul Morand (Gallimard. Folio Histoire. 1991)


Nous restons sous le règne de Louis XIV pour aborder la catégorie « les grandes figures de l’histoire » de la « bibliothèque idéale » qui va me permettre de retrouver Paul Morand.

Ce portrait concis de Nicolas Fouquet, richissime Surintendant sous la régence d’Anne d’Autriche et du premier ministre Mazarin qui sera désavoué et condamné à la prison à vie en 1661 au moment de l’accession au pouvoir de Louis XIV n’a, par contre, rien à voir avec les méthodes historiques d’un Pierre Goubert que je viens d’exposer.

Si Morand réhabilite Fouquet, c’est moins en historien soucieux de tirer un bilan historique et économique de son action qu’en homme de lettres qui admire le panache de l’homme qui fit bâtir le château de Vaux-le-vicomte et qui sut s’entourer des artistes les plus remarquables de son siècle (Le Nôtre, La Fontaine, Molière, Madame de Sévigné…).

L’auteur procède néanmoins de manière chronologique : un petit panorama généalogique, son ascension sous le gouvernement de Mazarin et ses liens ambigus avec le Cardinal, les débuts de l’absolutisme en 1661 et la rivalité avec un Colbert qui fera tout pour se débarrasser de ce rival gênant et enfin le procès et la fin de ses jours à Pignerol.

Est-ce parce que c’est réellement d’Artagnan qui fit arrêter Fouquet que ce récit historique m’a semblé se lire comme du Alexandre Dumas ? Toujours est-il que Morand fait de son personnage un véritable héros de roman (lorsqu’il le compare à Colbert, il note d’ailleurs que Fouquet est un personnage de Stendhal tandis que le futur intendant de Louis XIV est considéré comme un personnage de Balzac, envieux et laborieux travailleur sans grâce) et qu’il le défend sur toute la ligne.

Bien sûr, l’auteur ne nie pas la gestion plus ou moins douteuse du pays qu’a mis en œuvre Fouquet ni la manière dont il s’est enrichi prodigieusement grâce à sa fonction de Surintendant (à une époque où une grosse partie des impôts prélevés n’arrivait jamais dans les caisses de l’Etat). Morand a une jolie formule pour le qualifier : il parle d’un « honnête homme malhonnête ». Qu’importe les détournements de fonds et les méthodes employées pour renflouer le trésor public : Fouquet est pour l’auteur « l’homme le plus vif, le plus naturel, le plus tolérant, le plus brillant, le mieux doué pour l’art de vivre, le plus français. » de son temps.

On peut se demander jusqu’à quel point ce portrait de Fouquet n’est pas un autoportrait plus ou moins avoué de « l’homme pressé » Morand : un type brillant, un tantinet dandy uniquement préoccupé d’art et belles choses et peu sensible au labeur austère d’un Colbert, par exemple.

Fouquet plait au femme, il est l’ami des artistes (La Fontaine lui restera toujours fidèle) et il aime les livres et les belles choses : c’est ce qui importe le plus à Morand pour qui semble moins compter les actions que le style. Et entre le cardinal italien hypocrite (Mazarin), le roi despotique et son fourbe intendant (Colbert), c’est effectivement Fouquet qui a le plus de style et que Morand n’hésite pas à qualifier de « précurseur du Grand Siècle ».

Fouquet ou le soleil offusqué est un livre très agréable à lire (Morand est, lui aussi, un styliste de haute volée) même si son approche de l’histoire est un brin trop allusive et peut parfois perdre un peu ceux qui, comme moi, ne sont pas spécialistes du 17ème (heureusement que la lecture de Pierre Goubert m’avait un peu replongé dedans !). Je ne pense pas que les historiens professionnels le considèrent comme un ouvrage « sérieux » mais cette réhabilitation littéraire possède un certain panache qui mérite qu’on s’y attarde…

NB : Je constate avec dépit que l’histoire n’a pas l’air de vous passionner mais y aurait-il une bonne âme dans le coin pour conseiller une biographie historique méritant de figurer dans une « bibliothèque idéale » ?

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6 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Huuum. La seule biographie historique que j'ai lu pour l'heure est celle de Zweig sur Marie-Antoinette, mais elle vaut le coup! Pas de panique, bientôt moi aussi je serais au numéro 37 de ma bibliothèque idéale...

11:57 AM  
Anonymous Anonyme said...

Non, décidemment, l'histoire ne nous inspire pas...

10:15 PM  
Anonymous Anonyme said...

Comme je suis tout de même un peu obsédé par le monde romain je recommande bien sûr les mémoires d'Hadrien d'autant que j'ai le billet dans la poche pour l'exposition au British Museum et puis bien sûr La vie des douze Césars par Suétone et on peut enchaîner par la vie des hommes illustres par Plutarque

Bernard Alapetite

6:41 PM  
Blogger Eliza said...

Attention, les "Mémoire d'Hadrien" de Yourcenar n'est pas une "vraie" biographie, il y a quand même des éléments de fiction dedans, mais c'est vrai qu'elle reste très instructive et c'est un très chouette bouquin.

Pour rester dans l'histoire romaine, mon professeur d'auteurs latins m'a fortement conseillé (euphémisme) de lire "Auguste" de Pierre Cosme, qui est une biographie récente (elle date de 2005) mais qui est semble-t-il très complète et à peu près objective sur le bonhomme qu'était Octavien/Auguste.

Je ne l'ai pas lu, mais je compte le faire prochainement !

7:57 PM  
Anonymous voyance par telephone said...

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